La commission européenne essaie de savoir ce que les européens pensent des OGM

Régulièrement, la Commission européenne essaie de savoir ce que pensent les européens sur différents sujets. La visée n'est pas forcément populiste, mais peut être aussi de manipulation, surtout si son discours est récupéré par les industriels. Elle vient de rendre public son dernier Eurobaromètre 2019 (sondage européen). Il appelle de notre part plusieurs commentaires.

  1. 43% "pensent que les produits alimentaires sont pleins de substances dangereuses" ! (presenté comme "moins de la moitié des européens" p. 8/104);
  2. "Plus les répondants ont fait des études longues [stayed in education], plus ils se sentiront concernés par la plupart des sujets. Par exemple, 30% de ceux qui ont fini leurs études à plus de 20 ans sont concernés par les ingrédients GM dans les aliments et les boissons, comparés aux 19% de ceux qui ont quitté les études avant 15 ans." (p. 47/104) ;
  3. De façon similaire, "Plus les répondants ont fait des études longues, plus ils sont susceptibles de dire que [...] l'éthique et les opinions" sont importants [ethics and beliefs] (25% vs. 14%) (p. 14,15/104). Mais ce critère est aussi celui considéré comme le moins important. Seuls 7% des répondants le mettent en premier (parmi 6 dont le coût et l'origine !) (p.74/104).
  4. Le rapport tente de comparer EB2010 et EB2019. Il va jusqu'à soutenir que la question QD4 est similaire à celle de EB2010. C'est faux comme nous le montrons plus bas. Le rapport le reconnaît implicitement en note de bas de page 19 "Bien que ces questions ne soient pas directement comparables" ...). Il faut comprendre la structure des questions.
    Dans le EB 2010 il était demandé "Avant aujourd’hui, aviez-vous déjà entendu parler d’aliments GM ?" : 84% répondaient oui en Europe (QB2 p. 281/406)
    Dans le EB 2019 il était demandé "duquel parmi les sujets suivants vous avez déjà entendu parler ?" (parmi 15) : La réponse est "60% ont entendu parler des ingrédients GM dans les aliments ou les boissons" (p. 33/104) (et 65% en France cf. p. 78/104)
    De même, les nanotechnologies étaient connues de 46% des répondants européens dans le EB2010 (p. 294/406) mais seulement 30% restent dans le EB2019 ("nano particles in food" p. 33/104).
    Dans ces deux exemples, soit les européens ont oublié, soit les questions ne sont pas structurées pareil et les comparaisons sont donc hasardeuses.
    En résumé nous ne pouvons pas comparer EB2010 et EB2019, pour un autre argument encore. La question QD3 demande si ils "ont entendu parler de" certains des 15 sujets. Bien que plusieurs choix soient possibles,  ils avaient à choisir et alors à répondre pour chaque choix autant de questions.
    Plus scientifiquement parlant, nous soutenons que ce chiffre (moyen) de 60 % est faux car on voit dans l'analyse complète (p. 38/104):
    1. Quelles que soient les études des répondants, ils ont plus de 60 de connaissance (jusqu'à 70%).
    2. Quelles que soient les catérogies socio-professionnelles, toutes ont plus de 61 % (jusqu'à 74%).
    3. Seuls ceux qui ont des "difficultés à payer les factures" "de temps en temps" ont moins de 60 % (en fait 58 % contre 68%. Doit-on en conclure qu'une vaste majorité des européens a du mal à payer ses factures ?
    Une moyenne de pourcentages supérieurs à 60 % ne peut donner moins de 60% (sauf coefficients négatifs !).
  5. Le rapport EB2019 note que 55% "ont un haut niveau de sensibilité" i.e. ont déjà "entendu parler de plus de 8 sujets" (sur 15) et "13% de plus ont un haut niveau de sensibilité" (i.e. ils ont entendu parle de 6 ou 7 sujets) ! 7% ont une sensibilité "très faible [very low]". Les italiens ont seulement 25 % de "haute sensibilité" (plus de 8 sujets p. 35/104).
  6. Les industriels soutiennent que "Les ingrédients GM dans les aliments ou les boissons sont rapportés comme ayant un taux d'intérêt comparatoivement relativement bas de 27 %". Certes, il est dit dans EB 2019 que "Les ingrédients génétiquement modifiés dans le saliments ou les boissons, qui étaient le quatrième sujet dont les répondants étaient le plus inquiets dans le rapport EB2010, n'a plus été identifié dans le rapport 2019 que pour 27 % des répondants.". Dans une note de bas de page (19), il est reconnu que "les questions ne sont pas directement comparables." (p. 42/104 et aussi 84/104). La réalité est différente puisque la question Q4 consiste à demander de choisir 5 sujets parmi les 15 proposés et déjà retenus dans Q3. Par exemple inclure comme sujet "l'édition du génome", "l'hygiène alimentaire", "les résidus de pesticides dans les aliments" diminue l'impact du sujet OGM ! Présenter la sensibilité aux OGM comme baissant de 66% à 27 % est donc malhonnête.
  7. Le rapport conclu, après avoir morcelé les sujets, "Il n'y a pas un seul sujet de préoccupation de la sécurité sanitaire qui prévale dans tous les pays.". Peut-on en déduire comme EB2019 et les industriels que les aliments GM sont sans intérêt pour les européens ?

Nous craignons que la Commission vise surtout à négliger les différents sujets en les divisant pour éviter une opposition. Pour combien de temps ?

Fait à Paris le 15 juillet 2019

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