Le gène inséré est-il le même que celui prélevé ?

Bien qu'on dise partout que le code génétique est universel, que ce soit pour les plantes, les animaux, les bactéries (et donc qu'on peut prendre un gène dans un organisme pour le mettre dans l'autre et il marchera comme le fait une pièce de mécanique), c'est beaucoup plus compliqué. En fait, si il suffisait de faire cela, les industriels et chercheurs auraient fait beaucoup plus d'OGM. Il ne suffit pas de faire ce simple déplacement (qui nécessite d'ailleurs plusieurs outils très complexes pour "découper" le gène initial, d'autres pour le recopier, à un endroit ou à un autre, ...). Les industriels ne peuvent se contenter de simples déplacements.

Plusieurs modifications doivent être faites :

  1. Le promoteur (interrupteur marche/arrêt, qui dit où le gène pourra s'exprimer et avec quelle force) du gène du poisson se déclenche dans le sang du poisson. Il n'a donc pas de raison de se déclencher dans le fruit tomate comme on le voudrait ! Donc on met un promoteur issu d'ailleurs. Le promoteur le plus utilisé actuellement pour les OGM est une séquence d'un virus du chou-fleur.
  2. le terminateur (marque de clôture de la séquence codante) doit être changé.
  3. Plus important : on a expliqué que le gène du poisson arctique utilise des codons (groupes de bases ATGC) qui codent pour un acide aminé donné. Mais si la tomate utilise un autre codon pour le même acide aminé que celui du poisson, ou si l'ARNt correspondant est rare, la machinerie cellulaire peut ne pas savoir lire et transcrire ce codon en le bon acide aminé. C'est en fait ce qui arrive. On doit donc remplacer les codons " classiques pour le poisson " en ceux " classiques pour la tomate ".
  4. Pour le maïs OGM d'une entreprise, actuellement commercialisé, même en faisant ces modifications sur le gène inséré (le gène de la bactérie Bt de production d'un insecticide), les résultats n'étaient pas assez bons car la protéine Bt n'était pas produite en suffisamment grande quantité. L'entreprise a donc tronqué la séquence codante du gène (Vaeck et al. Nature 328, 33-37 1987 !). Plus précisément, les acides aminés 1-453 ont subi un remplacement des codons, 454-615 n'ont pas été changés et 615-1178 ont été retirés, ce qui a permis de rendre la toxine 100 fois plus exprimée sous forme directement toxique, même pour les animaux autres que les lépidoptères. On remarquera que cela signifie que la protéine émise, cette fois, est toxique aussi pour les animaux (dont les humains). La CGB et l'Etat n'en ont cure.
  5. La régulation des gènes passe aussi par des enhancers. Ceux-ci sont communs a des gènes d'une même catégorie et en régulent l'expression. On récupère l'enhancer du maïs pour le gène chimère issu initialement de la bactérie. On ne sait pourtant pas comment cet enhancer peut actionner le gène inséré ou si un autre enhancer pourrait, par hasard, ... l'activer.
  6. Les séquences introduites (dont je viens de signaler qu'elles ont été bricolées) ne sont absolument pas introduites précisément. Personne ne le nie, même si l'on pourrait envisager, en laboratoire, pour des quantités non industrielles de vérifier l'emplacement de l'insertion, ...
  7. Quand bien même la séquence codante introduite serait la caractérisation de la formule linéaire de la protéine (je n'ai pas écrit de la protéine !), elle ne donnerait aucun renseignement sur la structure secondaire, ni même tertiaire, ni même quaternaire (forme tridimensionelle) de la protéine. Or, seule la forme dans l'espace peut déterminer les sites actifs, donc l'efficacité de la protéine. Il existe par exemple des protéines chaperonnes qui déterminent la forme dans l'espace.
    Or elles sont spécifiques ..