Un pas de plus vers une dérégulation des nouveaux OGM / NTG ?
Paris le 14 mars 2025
La réunion des ambassadeurs des pays de l'UE qui s'est tenue vendredi 14 mars 2025 a vu, pour la première fois, une majorité qualifiée se dégager en faveur de la déréglementation des nouveaux OGM (renommés plantes issues de NTG). La réunion a donné un feu vert pour entrer dans des négociations en trilogue (Commission européenne / États membres / Parlement européen). Cette décision intervient après une offensive massive des groupes de pression de l'industrie biotechnologique, qui a duré plus d'une décennie. [1]
La proposition de la présidence polonaise signifierait que presque toutes les nouvelles cultures génétiquement modifiées entreraient sur le marché 1) sans aucune évaluation des risques sanitaires, 2) sans publication de méthode de détection, 3) sans étiquetage pour les consommateurs, 4) sans contrôle a posteriori ni règles de responsabilité et 5) sans possibilité de refus de culture par les États membres.
On pourrait nous objecter que l’étiquetage a été voté par le Parlement (à 51%). Mais plusieurs États membres le refusent absolument. Bref ces États refusent les étiquettes à leurs citoyens. De même le Parlement européen a voté l’interdiction des brevets, mais les lobbbyiste sont à la maneuvre. Il est possible que les États trahissent le Parlement et la démocratie.
Si cette dérégulation se mettait en place, les agriculteurs et les semenciers deviendraient plus dépendants des multinationales des semences biotechnologiques, car sous le risque de contaminations de leurs champs et de leurs semences par des gènes brevetés, liés aux plantes issues de NTG.
Cependant, tout n'est pas encore terminé. Par exemple, la Belgique a déclaré qu'elle n'accepterait de donner le feu vert à l'ouverture des négociations que si une évaluation des risques était ajoutée (spécialement sur les plantes à insecticides), et si les brevets étaient interdits. Ces positions sont incompatibles avec celle du gouvernement danois par exemple.
Une enquête publiée par EUobserver a révélé le niveau de pression exercé sur la Pologne. Les grandes multinationales de la biotechnologie ont tenté de convaincre les semenciers polonais d'adhérer à leur plate-forme de brevets ACLP. Cela permettrait de convaincre les gouvernements que de nombreux sélectionneurs de semences ont déjà adhéré à leur système de plate-forme de brevets (où seuls ceux qui ont des brevets peuvent les échanger …).
Dans l'article d’EUobserver, un semencier polonais indépendant est cité : « Si la loi NGT va dans le sens souhaité par les grandes entreprises, il n'y aura plus que quelques fournisseurs de semences sur le marché... Outre la perte de concurrence, il s'agit donc d'une perte de contrôle sur la chaîne d'approvisionnement alimentaire ».
Les poids lourds de l'agroalimentaire se sont adressés directement aux entreprises semencières publiques polonaises, les menaçant qu'elles seraient exclues des brevets clés si Varsovie ne jouait pas le jeu. Que le message ait été transmis au moyen de diapositives ou de quelque chose de plus fort, il est passé.
POLITICO, qui ne fait que de l’information, tient les mêmes propos
que nous sur la Pologne, sur le lobbying etc. [nous demander le
texte].
OGM dangers a produit un rapport pour prouver que l’étude sur l’impact des brevets demandée par le Parlement européen à la Commission européenne ne vise qu’à assurer un bon accès à coût raisonnable aux catalogue des semences [2]. Le gouvernement français a dit qu’il se préoccupait de la « diversité des opérateurs » … Comme cette attente n’est pas dans la mission, il se fera rouler (avec nous) par la Commission européenne.
Conclusion
Une fois de plus, ce sont les citoyens qui paieront la facture : les risques pour l'environnement et la santé, mais aussi l’information des consommateurs et des distributeurs ne seront plus pris en compte. Si le processus devait aller à son terme, il contribuerait à saper la confiance des consommateurs dans leurs aliments et dans la filière agroalimentaire.
Fait à Paris le (date plus haut)
Références :
[1] Comme l'a révélé le Corporate Europe Observatory, la campagne du
lobby des biotechnologies a consisté à mobiliser des fonctionnaires «
partageant les mêmes idées » dans les ministères nationaux, à
promettre des « avantages » non prouvés et à mettre en place diverses
plates-formes de lobbying pour faire pression en faveur de la
déréglementation au niveau de l'UE. Dans certains pays, des chercheurs
en biotechnologie (souvent directement intéressés par le développement
de la technologie) ont été invités à participer à cette campagne.
[2] Nous le demander. Il a été envoyé aux
fonctionnaires des ministères du Premier Ministre, Agriculture,
Environnement, Economie.